En Bourgogne du Sud, l’œnotourisme a repris des couleurs. Oubliez les dégustations ampoulées au fin fond des caveaux. Pour répondre à l’appel de la treille, prenez plutôt la « Route 71», une route des vins qui fait la part belle aux richesses des vignobles du Mâconnais et de la Côte châlonnaise. De quoi assouvir sa soif de découvertes et de rencontres originales dans cette Bourgogne aux airs de Toscane.
En Méhari au Château de Rougeon
Rien de tel que la géo-dégustation, au milieu de la parcelle où le vin a été fait, en osmose avec l’endroit même où les grappes ont mûri, pour le trouver encore meilleur. C’est exactement ce que propose Florence Bouchard, huitième génération de propriétaires du château de Rougeon, lors de son tour du domaine en Méhari. Au total 40 ha dont 12 de vignes et 28 de bosquets, de prairies, gérés en famille avec sa mère et son frère. Même les prés sont loués à un beau-frère éleveur. Après quatre ans de conversion, toute la récolte 2021 est en passe d’être certifiée bio. La moitié est dédiée à un cépage un peu négligé, l’aligoté, anéanti par le phylloxéra et depuis supplanté par le chardonnay. « Bissey est traversé par une veine de granit, une roche sur laquelle se complaît l’aligoté» , précise Florence. Le granit chauffe la journée et donne du raisin chargé en sucres, mais il se refroidit plus vite la nuit, ce qui fait plus d’acidité. Cela donne des vins faciles à boire, aromatiques au nez et dotés d’une belle fraîcheur en bouche. »
Château de Rougeon. Visite guidée du domaine en Méhari, 2h avec dégustation 49 €. Tél. : 06 95 93 06 71, www.chateauderougeon.com
Des sabots dans les vignes
Un ciel de flanelle sale couvre le coteau. Cela sent l’une de ces pluies de printemps tièdes qui ramollissent les jarrets. Qu’importe, car comme l’assène le dicton local « Pluie en avril remplit le baril » . Et puis il n’y a qu’à mettre le pied à l’étrier et se laisser conduire à travers les vignes par nos montures. Peut-on rêver meilleur poste d’observation que la selle d’un cheval pour visiter les vignes ? C’est bien ce qu’a compris Séverine Mornand, œnologue conseil pendant 20 ans dans la région, qui connaît tous les vignerons du coin et trouve avec ces balades équestres œnologiques le moyen de conjuguer deux passions. Au pas, au trot, voire au petit galop, les parcelles et les appellations s’enchaînent : Mâcon-Village, Pouilly-Fuissé, Pouilly-Vinzelles, Saint-Véran… La dégustation finale face à Solutré aura raison des courbatures.
Les Sabots de Verres, Chaintré. Randonnée dégustation, 90 € la demi-journée, 140 € la journée avec le repas. Tél. : 06 16 16 26 57.
Faire le cep dans le vignoble de la Luolle
Le domaine s’appelle la Luolle, un patronyme qui évoque à la fois la lune et Éole. Cela tombe bien, la biodynamie qui est pratiquée sur 30 % du vignoble dépend en bonne partie des cycles lunaires, quant au vent il a permis à Sandrine et Olivier Dovergne, respectivement ex-professeur d’histoire-géographie et ex-informaticien, d’effectuer un long périple en voilier au gré des îles atlantiques au cours duquel ils ont décidé de sauter le pas et de s’adonner à leur passion pour le vin. En 2017, ils rachètent 8 ha près de Moroges et font la démonstration de leur sérieux au fil des cuvées. Ce qui n’empêche pas la fantasque Sandrine, amatrice de théâtre, d’entraîner ses visiteurs au cœur des vignes dans une très originale balade basée sur les cinq sens. Il vous sera ainsi donné l’occasion de « faire le cep » dans les rangs, une nouvelle posture bientôt adoptée par les yoguistes chevronnés.
Domaine de la Luolle, Sandrine Dovergne, balade de 2h30, 21 €. Tél. : 06 21 86 05 27, www.domainedelaluolle.fr
Cuvées souterraines à Azé
Pour voir un peu ce que le Mâconnais a dans le ventre, direction les grottes d’Azé où sont organisées des visites œno-géologiques sous l’égide de la cave coopérative locale. La rivière de la Verzée a eu le temps de se frayer trois lits superposés à l’intérieur des calcaires du Bajocien et du Bathonien. Dans les larges boyaux, le thermomètre affiche 12 °C été comme hiver, des conditions intéressantes pour y faire vieillir du vin. C’est d’ailleurs l’expérience que tente la coopérative avec 600 bouteilles de Mâcon-Azé qui devraient y séjourner 171 jours (on appréciera le clin d’œil au chiffre du département). Trois dégustations viennent ponctuer le circuit, dont deux dans la grotte où le visiteur aura la bonne excuse de ne pas pouvoir recracher le contenu de son verre : afin de ne pas perturber le délicat milieu bactérien, aucune goutte d’alcool ne doit tomber au sol !
Grottes d’Azé, visites œno-géologiques sur réservation en juillet (1h30) autour de 8 €. Tél. : 03 85 33 32 23, www.grottes-aze71.fr
Plus d’infos: www.route71.fr , le site officiel du tourisme en Saône-et-Loire
Photographe: Christophe Migeon
