Cher Aller/Retour,
Je t’écris du Tamil Nadu où il fait très chaud et où je m’amuse bien. Voyager dans le sud de l’Inde offre le même exotisme bordélique que dans le reste du pays, sans la violence du spectacle de la misère, nourrissons sur le trottoir et estropiés purulents que l’on croise inévitablement à Bombay.
À Pondichéry, qui se situe dans le top 10 mondial du classement des plus beaux noms de ville, flotte encore un parfum d’indolence coloniale entre les rues Dumas et La Bourdonnais, mais avec des vaches. On s’y promène sur un front de mer où les vieux pratiquent la marche sportive comme à Miami. On y dîne dans des restaurants nichés dans des jardins de bambou où, après le délice d’un poisson tandoori, un rat de la taille d’un castor déboule entre les tables pour te rappeler que tu n’es pas à Miami.
À Tranquebar, on trouve une forteresse danoise datant de 1620, vestige incongru loti dans ce paisible village retiré de la côte. Peu d’étrangers passent dans les parages et les habitants me demandent parfois si je suis Danois. Ils me prennent souvent en photo, alors qu’en théorie, c’est tout de même moi le touriste.
Dans le Kerala, des lignes blanches sont tracées sur les routes et les motards portent des casques, ce qui est un indicateur pertinent du niveau de développement d’une contrée. Cet état se caractérise par son identité marxiste et sa tradition ayurvédique. Des drapeaux du PC local, régulièrement aux affaires, flottent un peu partout et le taux d’alphabétisation est le plus élevé du pays. La science ayurvédique, elle, promet de rééquilibrer tes énergies par diverses palpations à base d’huiles savamment élaborées au fil des millénaires. Poussé par la curiosité envers cette sagesse antique, je suis allé me faire frictionner et figure-toi que la praticienne a eu le toupet de me proposer un massage de la bite, alors qu’elle savait très bien que ma femme se trouvait dans la cabine mitoyenne. (…)