Un Noël à Phuket - A/R Magazine voyageur 2019

Phuket : un Noël « comme à la maison » ?

Un Noël à Phuket

Quand on aime sa progéniture, quoi de mieux que le paradis ? Et en guise de cadeaux de Noël : langoustes grillées, mangues juteuses, snorkeling dans la mer d’Andaman et promenades à dos d’éléphant. L’agence de voyages nous avait réservé un hôtel prometteur : deux piscines, plage privée, bungalow à l’air conditionné, minibar, terrasse face à la mer… Un voyage de rêve, donc, loin des trous du cul du monde que j’arpentais habituellement.

C’était oublier les déboires inhérents aux grains de sable dans l’organisation : correspondance ratée à Bangkok et arrivée tardive sur l’île, de nuit et sous la pluie. À l’hôtel, épuisés par le trajet, nous apprenions que notre bungalow sur la plage n’était plus disponible. À la place, une chambre sombre, humide, dans une lointaine annexe à l’architecture stalinienne, avec vue imprenable sur le parking. Et les poubelles. Pour se faire pardonner, la direction nous a conviés au christmas dinner organisé pour un groupe. Les Thaïs, en majorité bouddhistes, se contrefoutent de cette tradition chrétienne, mais bons commerçants, savent qu’elle compte pour les touristes occidentaux. Sur le papier décoré de rennes, la soirée promettait un Noël « comme à la maison » : champagne, sapin enguirlandé, paquets cadeaux, bonnets rouges, bûche avec scie en plastique, chansons et cotillons. Dans la réalité, eh! bien, le voyage nous l’enseigne, le paradis tient souvent à peu de choses, l’enfer aussi.

Prosecco-curaçao et cadeaux made in China

Comment rendre compte d’une succession de catastrophes dignes d’un film du Splendid revisité par Terry Gilliam et les producteurs de Very Bad Trip? En guise de  « champagne », du prosecco mêlé de curaçao (pour faire joli). Passons sur la déco, dégoulinante de mauvais goût, et l’absence de vrai sapin, somme toute logique sous les tropiques. Ne nous attardons pas sur le buffet (salade de pommes de terre, cochon trop cuit, gâteaux secs) pillé par un club de seniors probablement habitué aux cantines de l’Ehpad. Le plus insoutenable restant la musique, diffusée par des enceintes trop puissantes: du Richard Clayderman massacré par un orgue Bontempi désaccordé. Du genre à vous faire hésiter entre le meurtre et le suicide. Nous n’avions même plus le courage de rire au moment des cadeaux (pour ma part, un porte-clefs jaune dans une chaussette rouge made in China). N’y tenant plus, tenaillés par la migraine, nous avons lâchement fui avant la fin des festivités, lâcher de ballons, lancer de guirlandes, sarabandes, chenille, bal musette siamois et autres joyeusetés concoctées par les G.O. Nous avons regagné notre annexe où, cerise sur le gâteau, nous attendait un aréopage d’anophèles attirés par une fuite d’eau.

Mais, comme dirait James Bond, demain est un autre jour. Après une nuit passée à cramer les moustiques au chalumeau de mon briquet pour amuser mes marmots, le miracle de Noël s’est produit. La direction avait retrouvé notre bungalow, attribué par erreur à d’autres clients. Une armée d’employés a transporté nos bagages côté palmiers et d’angéliques serveuses (Miss Tea et Miss Coffee) nous ont servi le plus divin des petits déjeuners, avant de prendre les enfants sous leurs ailes protectrices.

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Écrit par
Sandrine Mercier
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