Nans & Mouts – Le voyage nu et culotté

Nans, c’est le brun ; Mouts, c’est le blond. Les deux gaillards n’ont pas froid aux yeux ni aux miches d’ailleurs au moment de partir à poil et sans argent mais avec une caméra. Leur but : voir une aurore boréale en Islande ou boire un chocolat avec le roi des Belges. Certaines personnes sur leur chemin les habillent, les nourrissent, leur chauffent le corps et l’âme. Paradoxalement, leur dénuement est le gage d’un voyage riche en émotions et en surprises. Vu à la TV !

Vous me faites penser à Rahan. Il est un peu comme vous, il se balade en slip, marche pieds nus, ne possède qu’un coutelas, et son truc c’est de voyager pour aller à la rencontre de « ceux qui marchent debout ». Vous lui devez quelque chose ?

Nans : C’est vrai qu’à la fin de chaque aventure, Rahan fait tourner son coutelas à plat sur une pierre et s’en va dans la direction pointée par la lame. Pareil pour moi, je ne décide pas où je vais. Ce sont les voyages, les rencontres, les évènements, la température, la pluie ou le soleil qui me mènent à droite ou à gauche. Nicolas Bouvier disait : « On croit qu’on fait le voyage, mais finalement c’est le voyage qui nous fait. »

Pour chaque épisode, y a-t-il une ébauche de scénario, des repérages ou est-ce de l’improvisation totale ?

Mouts : On fait quelques repérages pour savoir d’où l’on va partir, l’idée est avant tout de ne pas se mettre en danger. Lors de notre tout premier voyage, en sortant des bois, on est tombés à côté d’un centre aéré alors que l’on était habillés avec des bâches … On a besoin d’un coin tranquille, le temps de se fabriquer des vêtements végétaux qui nous permettront d’aller à la rencontre des gens.

Dans un épisode vous débutez par une nuit entre quatre bottes de foin sans même chercher un hébergement. Est-ce un moyen de vous mettre en condition ?

Nans : La nuit dehors faisait partie du mythe, on avait cette envie de se reconnecter avec la vie sauvage. On a mis du temps à cheminer et à s’habiller et lorsque que le soleil s’est couché, nous étions encore dans un champ, du coup on a dormi sur place ! C’est important d’expérimenter. La vie sauvage ne se résume pas aux cascades, aux jolis rayons de soleil, aux fruits du pommier … Il y a aussi la douleur aux pieds, le froid ou la faim. Ces épreuves font tout le prix des joies à venir. Ces expériences de nature sauvage créent une éveil nécessaire aux rencontres. La nuit dehors agit comme un sas. Si en arrivant de Paris ou d’ailleurs, on quitte nos sacs à dos pour se mettre tout nu et que sans transition l’on se met à rencontrer les gens, on reste malgré tout encombrés. Il est important d’éprouver le dénuement.

Pourquoi nus ?

Nans: C’est un engagement dans la vie sauvage, il n’y a pas de retour possible : avec un sac à dos, un couteau … tu peux arrêter et t’en aller quand tu veux. À poil, tu dois commencer par te faire des vêtements, chercher de la nourriture, etc. On avait aussi remarqué au cours de nos expériences que plus on s’allégeait, moins on contrôlait le voyage. On avait alors accès à des surprises, des choses qui dépassaient ce qu’on anticipait. Être nu, c’est l’allègement ultime.

Mouts : Quand on est habillé, on ne se rend pas compte de la force que l’on a en soi, mais quand on se met nu, ça réveille une énergie incroyable ! J’ai parfois l’impression de me rapprocher de ce que peut être le fait de partir à la guerre avec cette peur de mourir, alors qu’en fait on rencontre des conditions pas si dangereuses que ça. Mais on va puiser au fond de nous. C’est aussi une invitation à découvrir des choses qu’on ne connaît plus, le froid par exemple. Comment réagit-on quand on est tout nu et qu’il fait -5° C ? On a dû se former et s’entraîner. Le pire qu’on ait vécu, c’est de rester trois heures dehors par -7° C, tout nu avec sur le dos une espèce de bout de carton et une vieille combinaison de peintre. (…)

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Photographe : Matthieu Raffard
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Écrit par
Michel Fonovich
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