Sur les traces de Pasteur - Jura

Jura : sur les terres de Louis Pasteur

Qui a dit : « Chaque siècle connaîtra sa peste » ? Louis Pasteur. Jusqu’à présent l’histoire ne lui a pas donné tort, hélas ! Le savant français à qui l’on doit la pasteurisation qui permet de conserver les aliments est devenu une star mondiale grâce à sa découverte du vaccin contre la rage. En cette année 2022, il aurait 200 ans ! Filons sur les traces qu’il a laissées sur ses terres du Jura.

Arbois, la ville de Pasteur

127 ans après sa mort, Louis Pasteur semble toujours habiter ici, dans sa maison secondaire au bord de la Cuisance. Rien n’a bougé dans les pièces, pas un meuble, pas un bibelot, pas un tube à essai, pas un microscope. « On peut dire qu’il est le père de l’hygiène, car il a mis en place des règles strictes dans sa vie quotidienne, souligne Sylvie Morel, directrice de Terre de Louis Pasteur qui gère les Maisons de Dôle et d’Arbois. Avant de manger, il nettoyait son assiette et son verre avec sa serviette, un vrai TOC ! ».

Ce lieu de mémoire donne à voir une habitation bourgeoise de la fin du XIXe siècle mais surtout le seul laboratoire de Pasteur conservé en l’état avec ses instruments d’époque. « Il n’y a que le travail qui amuse ! », se plaisait à dire celui qui a mis au point la pasteurisation et a démontré que la génération spontanée des micro-organismes n’existe pas. En quittant la maison, on peut suivre un itinéraire Pasteur signalé par des microscopes gravés gravés sur les les trottoir. On découvre ainsi son ancien verger, son collège et le cimetière où toute sa famille repose, sauf lui. En effet, son corps trouve dans une crypte néo-byzantine située sous l’Institut Pasteur à Paris.

Pasteur et la légende du vin jaune

À Arbois, capitale des vins du Jura, impossible de passer à coté de la fruitière (lieu où l’on met en commun le fruit du travail) vinicole qui fut l’une des premières caves coopératives de France. Créée en 1906, elle obtient 30 ans plus tard l’AOC pour les vins d’Arbois répartis entre rouges, blancs et jaunes. Ces derniers inspirèrent à Pasteur des études très scientifiques dont les résultats seront publiés en 1886.

Penchons-nous sur le vin jaune obtenu en plaçant un vin blanc produit avec du savagnin dans des fûts pour au moins 6 ans. Cela pourrait mal tourner sans la présence de levures lesquelles forment un voile appelé « mycoderma vini » qui en absorbant l’oxygène permet une très lente oxydation. Au cours des 6 années, l’évaporation se traduit par une perte de volume d’environ un tiers. D’un litre, on passe à 62 cl, soit la taille de la bouteille locale, le clavelin. Très belle cave de dégustation dans l’ancienne chapelle du château de Béthanie.

Le Comté a une nouvelle maison

Faut-il rappeler que le vin jaune se marie très bien avec le comté ?  Celui que l’on surnomme le roi des fromages vient de s’offrir une grande maison en bois digne de son rang à Poligny. Quoi de plus normal pour la première AOC de France en volume, qui représente 2500 fermes, 140 fruitières et 1700 000 meules. On est accueilli par une montbéliarde en bois, avec autour du cou sa cloche, emblème du fromage.

© Mathilde Jegoux

Un parcours ludique nous dévoile de A à Z l’univers du comté. Savez-vous qu’il n’y a ni sel, ni lactose dans un comté ? Savez-vous qu’on peut déterminer  le nombre de mois d’affinage d’une meule en tapotant sur sa croûte à l’aide d’un petit marteau ? Dans la boutique, les fondus de Comté achèteront la salopette verte portée par les agriculteurs de la filière.

Louis, passe moi le sel !

Une halte s’impose à Salins-les-Bains, dans cette ville gardée par un mur d’enceinte et des tours de défense.  Au 60 rue Pasteur, une plaque désigne la maison de la famille paternelle de Louis Pasteur. Les parents de Louis se sont rencontrés dans ce haut lieu de la production de sel. Lui-même a mené ici des expériences sur les cristaux de sel et a étudié leurs vertus sur la conservation des aliments.

Mais pourquoi du sel, ici, dans cette vallée de Franche-Comté ? «  Il y a 210 millions d’années la mer venait jusqu’ici  et le Jura s’apparentait aux Bahamas avec lagunes et climat tropical. Le sel a été recouvert par des marnes et il reste présent à l’état fossile à 250 m sous terre, explique notre guide Perrine Lefebvre Girardot pendant la visite de La Grande saline. On a donc exploité les eaux naturellement salées, en les chauffant pour récupérer le sel par évaporation. Cet or blanc a fait la richesse de la Franche-Comté entre le XVe et le XVIIe siècle, car c’était une denrée précieuse et nécessaire pour conserver les aliments. A l’apogée, on a produit ici 12 000 tonnes de sel par an, c’était un site industriel majeur. » 

© Jura tourisme

En 1960 la dernière exploitation a fermé, mais on peut revisiter aujourd’hui cette histoire fabuleuse en découvrant une véritable ville souterraine dont l’ingénieux système de captation des sources reposait sur des norias activées par des centaines de chevaux.  «  On pourrait faire rentrer Notre Dame de Paris dans cette galerie », s’émerveille  Perrine et nous avec. Retour en surface pour s’imprégner de l’activité des saulniers dans la salle des poêles. « Ici les fours chauffaient l’eau salée et on récoltait le sel par évaporation . Il faut imaginer la chaleur étouffante avec une température de 50 °C et un taux d’humidité de 80 %.  Un vrai hammam ! » 

Aujourd’hui les eaux salées ne produisent plus de sel de terre comme à la grande époque. En revanche, elles sont utilisées aux thermes de Salins-les-bains.  Plus denses en sels minéraux que la mer Morte, elles permettent des bains en apesanteur. Louis n’aura pas eu le temps d’évaluer les effets du sel sur le bien-être, mais il suffit de s’immerger pour être convaincu de leur efficacité.

La Grande Saline est classée au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2009

Rando Pique-nique au Mont Poupet

La vie de Pasteur ne se cantonne pas à son laboratoire.  Il montait souvent au sommet du Mont Poupet à 850 m d’altitude pour réaliser des expériences. Xavier Goubard, accompagnateur de moyenne montagne, a imaginé une rando de 2h sur ce mont aux allures de cachalot qui domine la vallée de Dôle : «  Pour déterminer si la population de microbes est dépendante ou pas de l’environnement, Pasteur venait ici ouvrir  des ballons stériles contenant des bouillons de culture et les refermer tout de suite après, explique Xavier. Constatant que la fermentation était plus faible ici qu’à Paris, il en conclut quel’atmosphère du mont Poupet était plus pure que celle de Paris. »  Une évidence aujourd’hui, mais en 1860 une sacrée avancée.

Où bien dormir ?

Closerie des Capucines à Arbois 
Au cœur de la cité emblématique des vins du Jura, une maison d’hôtes au design contemporain logée dans un hôtel particulier du XVIIe s. 5 chambres spacieuses, un petit-déjeuner divin, un jardin et une piscine. A partir de 155 € la chambre double. 
https://closerielescapucines.fr/

© Florian Peallat

Relais&Château de Germigney à Port-Lesney
On passe la Loue et un château élégant entouré d’un grand parc apparaît rue Edgar Faure (ce village est celui de l’ancien homme politique). Un tout nouveau spa Caudalie a été réalisé par des artisans jurassiens avec un jacuzzi sur la terrasse. Ce qui permet de profiter du paysage aussi apaisant que les bulles. La Maison Jeunet d’Arbois a repris la cuisine depuis l’hiver 2021 avec le chef étoilé Steven Naessens dont le nom rime avec plaisir des sens. 30 chambres spacieuses à partir de 170 €.
https://chateaudegermigney.com/fr/

© Chateau de Germigney

Plus d’informations sur : www.jura-tourism.com

Photographe : Sandrine Mercier
Photo d’ouverture : Maxime Alexandre

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Écrit par
Sandrine Mercier
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