Bons baisers de Russie – Olivier Rolin

Olivier Rolin et la Russie, c’est déjà une longue histoire faite de voyages et de livres. Cette fois, l’écrivain s’intéresse au destin tragique d’Alexéï Vangenheim, une victime parmi tant d’autres de la terreur stalinienne. Prisonnier politique interné dans un camp des Solovki, ce météorologue de renom sera finalement exécuté d’une balle dans la nuque en 1937. Requiem pour une espérance révolutionnaire massacrée.

Pourquoi avez-vous tenu à raconter cette histoire particulière ?

Essentiellement parce que je suis allé à plusieurs reprises aux Solovki. C’est un endroit  sublime bien que le mot soit un peu galvaudé. Une forteresse avec une énorme muraille qui enclot des églises, des cathédrales, tout ça sur une île couverte de pins, de sapins au milieu de la mer Blanche laquelle est prise par la glace six mois par an. J’y suis allé d’abord pour des raisons touristiques mais je savais que c’était là qu’avait été installé, le premier grand camp de rééducation par le travail, celui qui allait jeter les bases du goulag. Au cours du premier voyage en 2010, je suis tombé sur une historienne qui m’a montré des tas de documents et notamment un album fait par Éléonora, à la mémoire de son père déporté. Dans cet album, il y avait des dessins magnifiques accompagnés de textes que lui avait envoyés son père. Cet homme, Alexéï Vangenheim, tentait depuis derrière les barbelés, d’apprendre à sa fille de quatre ans, à compter et à raisonner. Il ne la reverra jamais. Pourquoi j’ai écrit ? La réponse la plus simple, la plus vraie : à cause de l’émotion que j’ai ressentie en voyant ces dessins. Plus largement, ça fait longtemps que je m’intéresse au goulag.

Éléonora se suicide en 2011, 77 ans jour pour jour après l’arrestation de son père. Vous n’avez pas pu la rencontrer et elle n’a jamais su qu’un livre allait exhumer le destin de son père. Cela fend le cœur un peu plus encore.

Je pense que ça aurait été un grand soulagement et une grande joie, j’ose le dire, si elle avait su qu’il y avait un livre qui retraçait toute l’histoire de son père. Mais malheureusement je n’ai pas pu lui offrir ce plaisir. J’en profite pour dire que j’ai reçu une lettre de Météo France m’informant qu’ils avaient dans leurs archives des tas de documents où apparaît Vangenheim. Il y a quelques jours, j’ai fait une signature dans une librairie. Une personne est venue qui m’a fait dédicacer un livre pour la bibliothèque de Météo France. Elle m’a aussi remis des documents.
Pour écrire ce livre, il a fallu enquêter, retrouver des informations tenues secrètes.

Comment avez-vous procédé pour reconstruire le puzzle ?

C’était un travail méticuleux au cours duquel j’ai été plus qu’aidé. Pour tout ce qui concerne les circonstances de l’arrestation, les procès-verbaux et l’interrogatoire, ils avaient été recopiés à la main par Vassili Potapov, un ami d’Éléonora. Il l’avait fait pour rendre service, il y a quelques années, quand c’était encore possible d’aller consulter les archives du FSB (ex-KGB). On a donc mis à ma disposition ces procès-verbaux. Pour l’enquête, la recherche des circonstances et du lieu de l’exécution, j’ai rencontré deux personnes, magnifiques : Irina Flighé et Iouri Dmitriev, tous les deux militants de Mémorial, une association de défense des droits de l’homme. Ils m’ont tout raconté, expliqué, je suis allé sur les lieux … . La difficulté était simplement de mettre en ordre tout ça. (…)

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Le météorologue  – Seuil

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Écrit par
Michel Fonovich
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