Ay, caramba ! Voyage au pays de la turista - A/R Magazine voyageur 2018

Ay, caramba ! Voyage au pays de la turista

La turista ou la revanche de Moctezum

Nos souvenirs de voyages sont souvent paradoxaux. Prenez le Mexique, par exemple. Le pays réserve aux touristes de quoi les faire détaler à peine débarqués. À commencer par la fameuse turista, localement surnommée « la revanche de Moctezuma », du nom de cet empereur aztèque massacré par les conquistadors. Cette diarrhée aiguë n’est pas une légende : personne n’y coupe, y compris le bourlingueur chevronné bardé d’anticorps, à moins de se passer de glaçons, de salades fraîches, de fruits exotiques et d’eau du robinet quand on se lave les dents… Ajoutez à cela les moustiques (porteurs au mieux de bactéries allergènes, au pis de la malaria), la pollution (bâtie dans une cuvette, Mexico est irrespirable), la chaleur accablante, la poussière (il est recommandé d’imiter Pancho Villa, avec en permanence un foulard sur le nez), les trottoirs défoncés (sport national), les blattes géantes (y compris dans les meilleurs hôtels)… Sans oublier la corruption, la délinquance et l’ombre omniprésente des cartels.

En un mois de traversée du Mexique, d’est en ouest et du nord au sud, j’ai eu droit, successivement, à une conjonctivite, un malaise dû au mal d’altitude, une plaie au tibia causée par une chaîne rouillée tendue à travers une ruelle obscure, deux pneus crevés (avec une roue de secours voilée), un pont disparu dans un glissement de terrain, une douzaine de cafards écrasés par nuitée, une infection de la peau causée par les démangeaisons nocturnes, un début de pneumonie contractée à Veracruz et bien sûr une intoxication alimentaire, imputable à du cabri faisandé mariné aux épices.

Nostalgie du Mexique

Eh bien malgré cela, j’adore ce pays ! Abstraction faite de cette satanée turista, on y mange mieux que partout ailleurs en Amérique latine (l’empire maya est le berceau du piment, de la vanille et du cacao). L’histoire est omniprésente (avec ses fascinantes civilisations disparues : Olmèques, Toltèques, Mixtèques et autres Zapotèques). Les traditions sont encore vivaces (et je ne parle pas de La cucaracha, des mariachis et autres cassecouillos).

Voilà bien le paradoxe évoqué au début de cette histoire. J’ai rarement autant souffert au cours d’un voyage, mais j’ai la nostalgie du Mexique.

Une envie d’explorer d’autres TDCDM ? C’est ici que ça se passe.

© Martin D – Flickr Creative Commons

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Écrit par
Tristan Savin

Tristan Savin, écrivain bourlingueur, s’amuse à dénicher les lieux improbables. Son dernier livre : Les trous du cul
du monde (Arthaud, 2016)

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