Lanzarote, la cendrillon des Canaries

Amarrée en plein Atlantique à 140 km des côtes marocaines, Lanzarote est une beauté sauvage façonnée par les œuvres de l’artiste César Manrique.

Chapelle d’El Mojon. Ile de Lanzarote. Iles Canaries.

Le circuit César Manrique

Né en 1919 à Lanzarote, cet artiste génial et touche-à-tout tente l’aventure « sur la péninsule » (en Espagne), fricote avec l’underground new-yorkais des années 60 avant de s’en retourner dans son île à l’âge de 46 ans.  Créateur universel, écologiste avant l’heure, il convainc son copain d’enfance José Ramirez Cerda, gouverneur de Lanzarote, de conserver l’île dans son jus : code architectural épuré, interdiction des immeubles à étages et des panneaux publicitaires, limitation des stations balnéaires qui défigurent les côtes des îles voisines et intégration d’œuvres d’art dans la nature. De retour sur son île, Manrique avait prédit : « Je construirai un paradis sur les ruines de l’enfer ». Le pari semble plutôt gagné.

Fresque à la Fundacion Cesar Manrique. Tahiche. Ile de Lanzarote.

Le bonhomme a laissé son empreinte presque partout et les gens de Lanzarote n’ont de cesse de célébrer leur héros. Un an après le décès de l’artiste en 1992 dans un accident de la route, l’Unesco déclare la totalité de Lanzarote « Réserve de la biosphère ». Outre ses sculptures placées sur différents ronds-points, ses créations architecturales méritent le détour :
La Fondation César-Manrique, dans l’ancienne demeure-atelier des débuts de l’artiste, à Tahíche.
La Maison-musée César-Manrique, cinq bulles volcaniques réaménagées, à Haría. Manrique y a vécu de 1986 à sa mort en 1992.
Le Mirador del Rio, une ancienne forteresse de l’armée espagnole perchée en haut de falaises au nord de l’île, au-dessus du détroit entre Lanzarote et l’île de Graciosa. Une merveille d’intégration dans le milieu naturel… et un panorama somptueux.
Le Jameos del Agua sur la côte est. Un tunnel de lave produit par l’éruption du volcan de la Corona, abritant un lagon translucide, relié à l’océan par le jeu des infiltrations, car il se situe sous le niveau de la mer. Ne pas manquer l’auditorium, véritable bulle (jameo en langue guanche) spatio-temporelle.

La Fundacion Cesar Manrique. Tahiche. Ile de Lanzarote.

Dans le jardin, il y a des cactus

D’une ancienne carrière désaffectée non loin de Guatiza, sur la côte est, César Manrique est parvenu à faire un petit paradis où le vert des plantes contraste avec le bleu du ciel. Jusqu’à la fin du XXe siècle, toute la zone était dédiée aux plantations de figuiers de Barbarie pour l’élevage de la cochenille dont la couleur vermillon, une fois séchée, était utilisée pour teindre les tissus. Le jardin de cactus accueille près de 4 500 spécimens de 450 espèces différentes, regroupées en 13 familles de cactus venus des cinq continents. Le foisonnement d’épines et de piquants s’étage sur des terrasses en amphithéâtre. Du haut d’une petite colline, un moulin scrute l’horizon, où l’on moulait du gofio (céréales grillées) jusqu’au début du XIXe siècle. Inauguré en 1991, ce cactarium est l’ultime ouvrage réalisé par César Manrique sur son île chérie.

Entrée 6,50 €, ouvert tlj de 10h à 17h45.  www.cactlanzarote.com

Jardin de Cactus, dernière création de Cesar Manrique. Ile de Lanzarote.

Sous la cendre, le vin

Contre toute attente, la fureur des volcans n’a pas semé que misère et désolation : vers 1770, on découvre que la couche de lapili qui s’est déversée tout autour des dernières éruptions conserve l’humidité et peut jouer le rôle de paillage minéral. Des entonnoirs (hoyos) sont évidés à la pelle, parfois sur plusieurs mètres, jusqu’à la terre organique, un cep est planté tout au fond et un petit muret en pierres volcaniques érigé en arc de cercle pour protéger le tout, des vents dominants. Miracle de l’obstination des gens qui n’ont pour seules richesses que le temps et l’huile de leur coude. Comme le phylloxera n’a jamais posé ses sales petites pattes de puceron sur cette île, certains ceps affichent des âges canoniques, entre 100 ou 200 ans.

Elles ont beau être les plus précoces d’Europe — dès le mois de juillet — les vendanges n’en demeurent pas moins compliquées : avec ces vignes plantées au ras du sol sur des sols meubles et pentus, toute mécanisation est impossible. Le faible rendement — un trou, un cep, une bouteille — ne fait qu’enfler encore le prix des bouteilles qui s’écoulent entre 8 et 15 € pièce. Mais qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse… du paysage. Avec ses arabesques d’alvéoles qui criblent les flancs des volcans jusqu’à mi-pente, le vignoble est plutôt photogénique. Sous les pieds, la cendre simule le moelleux crissant du sable chaud. Chaque pas soulève une délicate farine minérale. Il tarde de faire couler la poussière du chemin par une dégustation de Malvoisie dans la fraîcheur du chai.

PRATIQUE

Situation

Des sept îles des Canaries, Lanzarote est celle qui est située le plus au nord-est de l’archipel à seulement 140 km des côtes africaines et à plus de 1 000 km de l’extrémité de la péninsule ibérique. C’est la quatrième par sa superficie (845 km2) et la troisième par sa population (145 000 habitants). L’île présente un relief de basses montagnes culminant dans le nord-est avec les Peñas del Chache (671 m). Le Sud est marqué par le massif des Ajaches, 561 m à son point le plus haut. Les paysages les plus spectaculaires s’égrènent au sud-ouest autour des volcans du Parc national de Timanfaya.

Y aller

Plusieurs compagnies à bas coût desservent Arrecife depuis Paris ou des villes de province en 3h30-3h45 de vol environ : EasyJet, Vueling ou Transavia. A/R entre 250 et 300 €.

Quand partir ?

Le climat se distingue par son caractère très printanier. En dépit de sa position sous le tropique du Cancer, l’île est rafraîchie par le courant froid des Canaries ainsi que les alizés qui soufflent du nord-est. Les températures à l’année ne dépassent pas 22 et 25 °C et ne descendent jamais sous les 12 °C en hiver. La température de l’eau oscille entre 17 °C en février et 22 °C en septembre. Pour la randonnée, éviter l’été où le vent souffle très fort.

Avec un TO

Terres d’Aventure propose un séjour de 8 jours « Lanzarote, l’île aux trois cents volcans » dont six jours de rando à partir de 1290 €. Mirador del Rio et la falaise de Famara, vignobles de La Geria, île de La Graciosa, Parc naturel de Los Volcanes de Timanfaya, Parc naturel de Los Ajaches. Les randos (entre 3 et 4h) s’effectuent le matin, l’après-midi est consacré aux visites culturelles ou au farniente sur la plage. Hébergement en résidence privée avec piscine. Départs toute l’année.
Tél. : 01 70 82 90 00, www.terdav.com

Dormir

Lanzarote compte de nombreux hôtels, mais aussi un certain nombre de fincas, casas et autres villas offrant une alternative rurale aux stations de la côte.
Seaside Los Jameos. L’architecture de ce 4 étoiles s’inspire des maisons typiques des Canaries, dont le hall remémore un patio traditionnel. Deux piscines et un spa complètent l’offre. À partir de 95 € la nuit. www.los-jameos.com
Ecolodge Famara. Une belle maison à l’architecture moderne du côté de Famara. Vues splendides ppour un prix économique : 50 €/nuit pour deux. Une chambre avec sa propre salle de bain et deux chambres avec salle de bain partagée. Minimum de 3 nuits.
Tél. : +34 622 899 332

Jameos del Agua, oeuvre architecturale de Cesar Manrique. Ile de Lanzarote. Iles Canaries.

Photographe : Christophe Migeon

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Écrit par
Christophe Migeon
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