Au sud de Cracovie, la voïvodie Malopolska, littéralement « Petite Pologne », cultive l’esprit des forêts et de la montagne. Stations thermales, églises en rondins, bergers fumés au feu de bois et bateliers volubiles pimentent ce voyage dans les massifs des Piénines et des Tatras, ultimes soupirs occidentaux des Carpates.
Szczawnica, une affaire de famille
En 2004, André Mankowski, petit-fils du comte Stadnicki, le promoteur de la station thermale de Szczawnica durant l’entre-deux-guerres, parvient à racheter en 2004 une partie des terrains nationalisés quelque 56 ans plus tôt. Avec ses trois enfants, Christophe, Nicolas et Helena, élevés en France, il se lance dans un gigantesque programme de restauration. Tour à tour, les bâtiments de la ville retrouvent leur lustre d’antan : le café Helena, le bar à eaux minérales de 1863, la villa « Pod Modrzewiami » construite en 1938 pour l’une des filles du comte, ressuscitée en palace (le premier hôtel cinq étoiles de la région) ou encore le manoir du XIXe siècle Dworek Goscinny ravagé par les flammes en 1962 et entièrement reconstruit selon les photos de l’époque pour reprendre son rôle de centre culturel. « Dans les années 1930, Szczawnica était la station la plus cotée du pays. Notre objectif était de la ramener sur la carte de la Pologne », explique Christophe Mankowski. En 15 ans, au rythme d’un ou deux bâtiments rénovés chaque année, le visage de la station a bien changé. Le travail à faire reste considérable. Ça et là, les vieilles pensions en bois vermoulu finissent de pourrir aux côtés d’immeubles d’inspiration soviétique aux peintures écaillées et rappellent que Szczawnica est une Belle au Bois dormant tout juste sortie de son lit.
Gueule de bois
Pour un voyage dans le temps, direction Chochołów, à 15 km au nord-ouest de Zakopane, un village typique qui a conservé la plupart de ses vieilles maisons en bois. Toutes ont été réalisées sans le moindre clou avec des rondins d’épicéas calfeutrés à la mousse. Certaines remontent à la fin du XVIIIe siècle. Les façades sont chaque année soigneusement lessivées au savon pour les débarrasser de leurs lichens. Les réputations ici se font en fonction de la couleur des murs : une demeure grise trahit la paresse de ses occupants. L’atelier du sculpteur Jan Zieder est situé dans une bâtisse de 1902, attenante à une dépendance de 1818 qui fut habitée par sa tante… et une vache pour se tenir chaud. Il lui arrive de construire des maisons en bois mais il préfère sculpter des sujets religieux dans du bois de tilleul. Chaque année pour la Pâque, il se fait un petit Christ assis et songeant aux évènements de l’année. Pour 2020, Jésus fait grise mine et écrase sous son pied un gros virus.
Texte et photos: Christophe Migeon