Hotel California, un tube planétaire et un hôtel mythique - A/R Magazine voyageur 2018

On a retrouvé l’Hotel California, tube planétaire et hôtel mythique

Hotel California, un tube planétaire

Un slow d’enfer, ajoutent les nostalgiques. Que raconte cette chanson, dont tout le monde connaît la rengaine à défaut d’en avoir décrypté les paroles ? « Sur une sombre autoroute désertique, l’air frais dans mes cheveux. Le parfum tiède des colitas s’élève dans l’atmosphère. Au loin, j’aperçois une lumière vacillante… » Notre voyageur solitaire échoue dans un hôtel, perdu au milieu de nulle part… Autant dire dans un TDCDM*. Mais lequel ?

Quand je me suis rendu en Californie pour la première fois, il y a vingt ans, le titre m’est revenu en mémoire. D’où l’idée saugrenue de retrouver l’hôtel en question. Mais aux States, on trouve surtout des motels. J’ai parcouru Malibu Beach, où Don Felder aurait composé la mélodie de la chanson sur sa guitare 12 cordes. Hélas, aucun bâtiment semblable à celui de la pochette de l’album. La chanson a inspiré quantité de légendes : le lieu ne serait pas celui que l’on croit, les paroles feraient référence à une maison hantée, le vinyle dissimulerait des symboles satanistes… Autre rumeur persistante, pour ne pas dire plausible, il s’agirait d’un centre de désintoxication.

De quels indices dispose le chasseur de TDCDM ? En espagnol, les colitas sont des tresses. Mais en argot mexicain le terme désigne les bourgeons de la marijuana. D’autres références à la culture hispanique m’ont mis sur une piste : les cloches d’une mission, les palmiers sabal et l’architecture coloniale de la pochette intérieure. Le véritable Hotel California serait-il au Mexique ? Je suis tombé dessus à Todos Santos, dans la péninsule de Baja California. Une élégante hacienda à la façade ocre, ornée de palmiers. La direction de l’établissement prétendait qu’il aurait inspiré la chanson. Mais gros bémol, le groupe lui a fait un procès, arguant qu’il n’en était rien. J’ai poursuivi mon voyage et déniché un Hotel California à Guayaquil (Équateur). Fausse piste, il s’agissait d’un bouiboui, sans aigles, mais plein de cafards.

« Contrairement à ce que je pensais, l’Hotel California se trouvait bel et bien en Californie »

J’ai localisé une pension du même nom à Rio Ceballos (Argentine). Il y avait bien un palmier — chétif — dans la cour, mais la comparaison s’arrêtait là. Même déveine à Pacho (Colombie), un authentique TDCDM. L’Hotel California de la Isla Margarita, au Venezuela, était plus luxueux, mais son architecture moderne ne prêtait pas au rêve. Dépité, j’ai relu les notes de la pochette. Un nouvel indice a surgi : le groupe avait enregistré en Floride. Après Miami, j’ai échoué à Palm Beach, devant les façades baroques de luxueux palaces. El Mirasol et Don Cesar présentaient certaines similitudes à l’exception des tourelles à clochetons.

Enfin, il y a peu, en transit à L.A., je me promenais sur le fameux Sunset Boulevard d’Hollywood quand une silhouette a attiré mon attention. Un bâtiment de style néo-colonial noyé sous les palmes. Trois coupoles surmontées de drapeaux… Le Beverly Hills Hotel correspondait pile-poil à la photo de la pochette. L’établissement des années 1920, surnommé Pink Palace (détail non négligeable, on boit du champagne rosé dans la chanson), a vu défiler Charlie Chaplin et Marylin, Sinatra et John Lennon. Ma joie se mêlait à une certaine déception. Ce n’était pas un trou du cul du monde, tant s’en faut. Et contrairement à ce que je pensais, l’Hotel California se trouvait bel et bien en Californie.

* TDCDM (Trous du cul du monde)

© Wayne Stadler – Flickr Creative Commons

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Écrit par
Tristan Savin
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