Antarctique. Croisiere a bord de l'Exploris One. Lever de soleil en baie Andvord, situee sur la cote de la Terre de Graham decouverte par l'explorateur belge Adrien de Gerlache au debut du XXe siecle // Antarctic. Cruise on board Exploris One. Sunrise on the Andvord bay, located in the Graham island discovered in early XXth century by the belgian explorator Adrien de Gerlache.

Antarctique : croisière glaçons, croisière frissons

Si l’on navigue plein sud à partir d’Ushuaia, on rencontre après deux jours de pleine mer, une pointe de terre capitonnée de glace. C’est une mèche du continent Antarctique qui rebique, c’est la grandiose péninsule Antarctique. Cabotant d’îles en détroits, de glaciers en icebergs, on s’enivre de beauté brute, on croque dans la nature sauvage, on oublie l’agitation du monde. Bienvenue dans le paradis blanc. 

Jour 1 – Où je fais connaissance avec le passage de Drake

© Antoine Lorgnier

Qui veut aller sur la péninsule antarctique à partir d’Ushuaia n’y coupe pas, il doit traverser le passage de Drake, ainsi nommé en l’honneur du corsaire anglais Francis Drake qui pourtant n’y trempa jamais la coque de son navire et ne fit que subodorer son existence en 1578. Ainsi l’Histoire a fait un affront à Willem Schouten, un Hollandais qui le premier navigua dans ces eaux ô combien tumultueuses en 1616 et qui à ce titre méritait, lui, de laisser son nom sur les cartes marines. Cette voie navigable reliant l’océan Pacifique à l’océan Atlantique s’étend du cap Horn aux îles Shetland du Sud et offre l’itinéraire le plus court vers le continent glacé. Court mais intense.

Quelques personnes expérimentées m’avaient mis en garde : « Tu verras le Drake, ça secoue. Je te conseille de prendre un comprimé de Mercalm. » Un Mercalm, moi ? Ils ne connaissaient pas le vieux loup de mer. La suite des évènements prouvera que je m’étais pris pour un autre. Dans la nuit, mon lit se met à giter. Au matin, j’ai dû mal à tenir debout. Autant se recoucher. Adieu les mises en bouche et autres mets raffinés. Adieu les conférences. Je trouve toutefois la force de récupérer auprès de l’équipage une parka et une paire de bottes. 

Jour 2 – Qui coïncide avec l’apparition du premier iceberg

Il n’est jamais trop tard pour prendre un Mercalm. Merci à toi Teddy, qui m’a donné un médoc quand mon estomac ne tenait plus le choc. Séquence émotion : par mon hulot, pardon, par mon hublot, j’aperçois flottant sur la mer déchaînée un premier iceberg constitué de deux belles dents blanches qui se rient de la tempête. Ça promet. C’est aussi le signe qu’on approche de la terre. Pour fêter ça, un dîner de gala est prévu. Je suis prêt.

Jour 3 – Qui traite de kayaks, de zodiacs et de pinnipèdes

© Antoine Lorgnier

Après avoir emprunté le détroit de Gerlache, le navire progresse à très petite vitesse vers Neko Harbour. L’aurore aux doigts de rose colore le ciel, quelques élégants nuages, les hautes montagnes empanachées de neige et les côtes meringuées de glaciers. Tout est silence. Tout est calme. Tout est beauté. Moment idéal pour revêtir une combinaison étanche et sortir les kayaks. Julie dispense quelques rudiments techniques au premier groupe de volontaires, y ajoute des conseils de prudence et promet de veiller sur nous comme une cane sur ses canetons. Je voulais de la glace, eh bien je suis servi. Je pagaie dans le brash, une surface pleine de glaçons n’excédant pas les deux mètres selon la nomenclature internationale des glaces. Un phoque de Weddell vautré sur un iceberg soulève une paupière, évalue la situation, et décide de se rendormir.

Jour 4 – Où l’on croise l’autoroute à manchots

L’Exploris One se faufile à travers l’étroit canal Lemaire flanqué de vertigineuses falaises et de glaciers replets pour déboucher à Port Charcot une petite baie située à l’extrémité nord de l’île Booth. Elle fut découverte en 1904 par l’explorateur Jean-Baptiste Charcot qui naviguait sur Le Français. Ce patriote mit à profit son hivernage pour notamment construire un cairn au sommet d’une colline. Il est toujours là. Pour y accéder, on chemine en file indienne dans la neige en passant non loin d’une colonie de manchots papous, lesquels ne montent plus là-haut. Le cairn, ils l’ont assez vu comme ça. Pour se déplacer, ces oiseaux privilégient les grands axes, soit ce qu’on appelle les autoroutes à manchots qu’ils façonnent à force de piétinements maladroits.

Tourisme en Antarctique

3 questions à Alexandre Taithe, maître de recherche à la Fondation pour la Recherche Stratégique à Paris et conférencier à bord d’Exploris One.

L’Antarctique est-il une destination prisée ? 

Le tourisme polaire est en pleine explosion. On est passé de 3 000 personnes visitant l’Antarctique en 1991 à près de 100 000 aujourd’hui. C’est surtout la péninsule Antarctique qui est fréquentée, car elle est proche de l’Amérique latine, Ushuaia se situant à 1 000 km. De gros bateaux pouvant accueillir jusqu’à 5 000 passagers y vont, mais ils n’ont pas le droit de débarquer au sud du 60e parallèle selon les termes du Code polaire. Seuls les bateaux de moins de 200 passagers peuvent le faire par groupes de 20 touristes maximum accompagnés d’un guide. C’est l’Association internationale des voyagistes antarctiques (IAATO), dont la compagnie Exploris est membre, qui a adopté ces règles de bonnes pratiques. Ils ont compris l’intérêt de protéger la santé de l’Antarctique. 

Quels risques engendre ce tourisme ? 

On voit naviguer de gros bateaux sans coque renforcée qui ne sont pas adaptés au milieu polaire. En cas de problème, qui va les secourir ? Ils pourraient en coulant causer une petite marée noire. Leur interdiction s’impose. Une autre préoccupation est le surpâturage. Pendant les quatre mois de l’été austral, il y a une forte concentration de touristes dans l’ouest de la péninsule, la zone la plus accessible. On pourrait aussi craindre qu’à l’avenir des pays n’ayant pas adhéré au Traité sur l’Antarctique emploient des bateaux de croisière qui ne respectent pas les règles IAATO concernant par exemple les pratiques sanitaires de descente à terre, de traitement des eaux, des déchets, de respect de la faune et de la flore…

Pour protéger l’Antarctique, le meilleur moyen n’est-il pas de s’abstenir d’y aller ?

En tant que passagers de la croisière, nous sommes mal placés pour dire aux autres de ne pas s’y rendre. Quel équilibre trouver entre protection et exploitation des milieux polaires ? La question se pose en Antarctique comme en Arctique. Un tourisme durable est possible à condition de limiter la taille des bateaux, d’imposer un système de contrôle à bord pour vérifier que toutes les règles sont respectées. On peut aussi espérer que les progrès technologiques permettront de construire des bateaux entre guillemets propres. 

Pratique

L’Antarctique, si inaccessible, si mystérieux, si sauvage. Qui n’en a pas rêvé ? 

Y aller avec Exploris

Exploris est une compagnie de croisières d’expédition créée en 2021 par Philippe Videau et une équipe d’experts passionnés. Elle emmène ses clients à la découverte de destinations d’exception, d’endroits les plus reculés et les plus inaccessibles de notre planète.

Officiers, guides et naturalistes sont francophones. Les expéditions sont limitées à moins de 140 passagers, et même à moins de 120 en régions polaires. À chaque instant, la priorité est donnée à l’expédition, à l’observation et aux sorties à terre…

Croisières antarctiques

« À la découverte du continent blanc » (12 jours (dont 2j à Buenos Aires) / 10 nuits à bord). L’essentiel de l’Antarctique est réuni en un voyage : la glace sous toutes ses formes, les colonies de manchots, l’observation des mammifères marins, l’histoire d’une exploration héroïque. Vol Paris-Buenos Aires puis Buenos Aires-Ushuaia. Prochaines dates : 03/01/2025 – 14/001/2025, 29/01/2025 – 09/02/2025, à partir de 8 700 € vols non compris. 

« Objectif 66°33’ : l’Antarctique du cercle polaire ». On passe le cercle polaire Antarctique, une expérience au-delà des émotions classiques. Prochaines dates : 08/02/2025-21/02/2025, à partir de 10 270 €.

« La grande boucle australe ». Péninsule Antarctique, îles Malouines et Géorgie du Sud. Prochaines dates : 13/01/2025- 30/01/2025, à partir de 10 270 €.

Plus d’infos : www.exploris.com. Tél. : 01 87 12 32 32

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Écrit par
Michel Fonovich
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